03 janvier 2007 : Paycheck, de Philip K. Dick à Ben Affleck
Philip K. Dick est l’un des grands auteurs américains de science-fiction de la seconde moitié du XXe Siècle et Paycheck une de ses nouvelles adaptées en film. Si le nom de Philip K. Dick reste très peu connu du grand public, son ouvre est très appréciée des spécialistes de SF et surtout très célèbre à travers ses nombreuses adaptations au cinéma: de Blade Runner à Minority Report en passant par Total Recall, c’est lui! Sa nouvelle Paycheck (en français La clause de salaire) est tirée du recueil Paycheck et autres récits. Le titre original (Paycheck: classic stories) traduit bien l’ambiance dans laquelle ces histoires courtes nous plongent, celle de l’âge d’or de la SF, la science-fiction des années 50. On retrouve donc en pleine guerre froide sous une menace nucléaire, le schéma familial de la mère au foyer et du mari au boulot étant vraiment daté. Le plus intéressant est l’étude psychologique des personnages même si l’histoire est souvent très originale. Quant au regard de Dick sur la nature humaine, il est essentiellement désabusé. On retiendra notamment Une petite ville ou Le père truqué qui semblent avoir donné des scénarios de la Quatrième dimension. Un p’tit quelque chose pour nous les temponautes nous plonge au coeur des paradoxes temporels tandis que Nanny rappelle les robots d’Asimov, en beaucoup plus cynique. L’une de mes préférées est Le monde de Jon, très émouvante, qui reprend les thèmes classiques de Dick sur la confusion mentale. Et puis il y a cette nouvelle étonnante, Au temps de Poupée Pat, où les personnages, privés de leurs repères sociaux après une guerre nucléaire, essaient de s’en recréer à partir d’un jeu … de poupées. Unique. Seul faux pas, la dernière nouvelle (Les pré-personnes) de 1974 essaie de jeter l’anathème sur l’avortement en le comparant à la suppression d’enfants jusqu’à l’adolescence. A oublier! De la nouvelle Paycheck, les scénaristes du film n’ont gardé que l’idée de départ: un scientifique chargé d’une mission secrète dont on lui a effacé les souvenirs a choisi de troquer sa paye contre quelques objets apparemment quelconques mais qui lui seront bien utiles! Le message politique (ambiance 1984 d’Orwell) a totalement disparu. Ben Affleck est assez loin du savant plutôt banal de la nouvelle et Uma Thurman hérite d’un rôle féminin réévalué. Quant à la fin, totalement réinventée, elle est très loin du cynisme de Dick. Néanmoins, les scénaristes ont eu la bonne idée de placer l’histoire dans un futur très proche, plus que celui de la nouvelle en tout cas, ce qui renforce le réalisme du film. Quant à John Woo, il réalise le tout d’une main de maître même si l’ensemble se distingue peu de ses autres productions (tiens, encore une poursuite à moto!) et finalement des autres films de la même catégorie. Une impression de déjà vu. Alors, quelle sera la prochaine nouvelle adaptée au cinéma? Eric_M (catégories Lectures & Films-Séries) Liens Le ParaDick, Philip K. Dick en français Paycheck, la fiche du film sur AlloCiné Paycheck, le site officiel du film avec un jeu de mémoire amusant Isaac Asimov nous donnait des nouvelles des robots, ma chronique
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01 janvier 2007 : L’année nous veille
La plupart d’entre nous ont veillé cette nuit pour l’attendre. Que l’année 2007 veille sur nous et apporte à chacun bonheur et santé. Je ferai court sur les vœux de bonne année. Je vous souhaite évidemment le meilleur pour 2007. Qui dit nouvelle année dit nouveauté : le site s’offre donc un lifting assez léger (avez-vous remarqué les changements?) Le plus visible est l’intégration des players Radio Blog aux pages audio comme sur la page d’accueil suivant le principe du profil Myspace. Mais qui dit changement d’année dit aussi inévitable bilan. Et quand je vois l’étendue des posts auxquels vous avez échappé en 2006, je me dis que non, décidément, je ne pouvais pas commencer 2007 sans vous en parler! Vous avez remarqué que je suis plutôt resté discret pendant les fêtes. C’est qu’ayant été honteusement gâté à mon anniversaire et à Noël, je ne voulais pas vous dégoûter :p Je vous reparlerai sûrement des livres et des disques mais je devais évoquer l’indispensable Universal FM Transmitter de Kensington, pour écouter son mp3 sur son autoradio, ainsi que le superbe appareil photo bridge Lumix de Panasonic 🙂 Vous jugerez à mes prochaines photos de vacances 😉 Côté lectures, j’aurais dû chroniquer Le chant des sables, très bon suspense de Brigitte Aubert, avec des mystères archéologiques comme on les aime et des passages trépidants à la Indiana Jones même si la fin part un peu trop dans le surnaturel. J’aurais pu parler du dernier Blake et Mortimer, Les sarcophages du 6e continent, par Yves Sente et André Juillard. Bien dans l’esprit de E.P. Jacobs, le dessin reste un peu rigide et les dialogues un peu bavards mais les auteurs font une plongée très intéressante dans la jeunesse de Mortimer, inventant notamment sa rencontre avec Blake. Côté Internet, j’ai lâchement brisé deux chaînes dont la chaîne des chansons transmise par Matthieu (honte sur moi, ma descendance sera maudite jusqu’à la 15ème génération). J’avais pourtant imaginé que la « chanson pour chialer dans sa bière » devait être Amsterdam de Brel parce qu’on y pisse comme je pleure. Bref. J’ai aussi omis de vous dire que mon ordi était habité par Clarika (certains devaient s’en douter). J’ai en fait remplacé les sons Windows par des extraits de Clarika 😉 Toutes les explications ici. Sans oublier les 7 vidéos de Clarika que j’ai mises en ligne sur Dailymotion dont la dernière hier! Côté humour, j’aurais dû vous parler de Franck Dubosc, excellent sur scène, improvisant de manière jubilatoire. Attention public, si tu montes sur scène avec lui, tu pourrais le regretter, comme la fille du stop qui jouait au ralenti et le jeune à capuche qu’il n’a pas loupés 🙂 Dans un autre style, Roland Magdane propose un spectacle terriblement bien écrit, avec quelques délires surréalistes (comme le régime de cure) à hurler de rire! Côté musique, j’étais sensé vous donner la suite de l’interview de Goldman dans Chorus (voir le début ici). De cette interview très fouillée, je retiens ceci: Entre gris clair et gris foncé, disque préféré des fans, est celui que JJG aime le moins car « fait de raccrocs, de reprises », avec « trop de titres » et des « chansons rapides » dont il n’est pas satisfait même si « les chansons lentes, elles, ne sont pas mal »! Rouge est le premier album que JJG a fait pour lui: « jusque-là, j’avais essayé de faire des chansons qui plaisaient aux gens (…) pas qu’à moi, c’est ce que je veux dire ». Puis « la scène a pris une telle place dans ma vie que je ne pense pas qu’elle puisse en sortir définitivement ». A quand le retour? Côté films, j’ai évoqué L’Etrange Noël de Mr Jack à l’occasion des Noces funèbres de Tim Burton (voir ici). Noël venant de passer, j’ai fabriqué grâce au DVD une Radio Blog de 13 titres de l’Etrange Noël. Vous pouvez donc écouter la quasi totalité des chansons de Danny Elfman superbement adaptées en français par Philippe Videcoq, jusqu’au générique de fin. Voici mon cadeau, d’autant plus précieux que le disque en français n’existe plus! Offrez-vous ce pur moment de poésie en cliquant ici 🙂 Enfin côté concerts, je vous ai parlé en 2006 de ceux de Jamie Cullum (lire ici), d’Anaïs (lire ici), de Jehro (lire ici) ou encore de Corneille (lire ici) mais pas de leurs disques. Et si, au lieu d’un long discours, je vous offrais 8 chansons pour commencer l’année? Alors j’ajoute à la Radio Blog Disques: Get your way et Mind trick de Jamie Cullum (Catching Tales – 2005); Même si la vie c’pas du foie gras et Christina d’Anaïs (The Cheap Show – 2005); Everything et Continuando de Jehro (Jehro – 2005) ; Seul au monde et Qu’est-ce que tu te fais de Corneille (versions acoustiques – Parce qu’on vient de Loin – 2003). A écouter en cliquant ici. Au fait, bonne année 😉 Eric_M (toutes catégories) Liens Cliquez sur les noms en gras ci-dessus, vous avez de quoi faire!
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27 septembre 2006 : Spirou à Tokyo, albums n°49 et 49Z
Pour la sortie de leur nouveau Spirou et Fantasio, Morvan et Munuera ont eu la bonne idée de sortir aussi le « guide de l’aventure ». Pour 2 fois plus de plaisir. Vous voulez savoir d’où viennent les histoires de monstres géants japonais? Vous voulez découvrir les différentes écritures japonaises? La hiérarchie sociale dans le Japon ancien? Savoir d’où vient le mot yakuza et connaître les détails de leur code d’honneur? Parler le franponais? Et bien sûr vous plonger dans l’univers des mangas? Alors vous devez vous procurer Le guide de l’aventure à Tokyo. Bien plus qu’un making-of, le n°49Z est un magnifique objet format BD mais en longueur qui décrypte toute la société japonaise avec ce ton à la fois décalé et didactique que l’on retrouve dans les dossiers de Spirou Magazine. Moi qui n’avais jamais envisagé d’aller visiter le Japon, je me suis rendu compte à quel point leur culture peuple notre imaginaire: les samouraïs, les ninjas, le Shogun, les geishas, les yakuzas, le Fuji-Yama et bien sûr les dessins animés et la technologie de pointe. Ca m’a vraiment donné envie d’aller voir sur place! En plus, ce numéro spécial contient le très excitant premier chapitre du futur manga Spirou dont seules les premières pages étaient parues dans le magazine. On y découvre une version de l’adolescence de Spirou et de sa rencontre avec ses compagnons. Scénario français mais dessin japonais: dépaysement garanti! Vous vous demandez pourquoi l’album s’appelle 49Z? Allez, je vous le dis: en japonais, Z est l’initiale de 2 et indique donc la suite d’une série … comme dans Dragon Ball Z 😉 Mais que dire de l’album lui-même, le n°49? Eh bien un peu la même chose que pour les 2 premiers. De nouveau les auteurs reprennent des personnages classiques. Ici, c’est l’ère Fournier qui est à l’honneur avec une version modernisée de son Itoh Kata heureusement débarrassé de la société secrète du Triangle à l’aspect tellement vieillot. Quant au graphisme, il est toujours aussi réussi même si, comparée à celle du manga Spirou, l’animation paraît sage voire statique! Mais dans le scénario, il me manque encore cette « ligne claire » qui permet d’imprimer de façon unique les histoires de la BD classique dans la mémoire. J’ai été passionné par les 50 premières pages comme par une magnifique introduction. Je m’attendais à ce que l’aventure commence alors sauf que la BD comporte … 60 pages! Quelle déception de voir tout se résoudre en si peu temps! Il y avait matière à créer une histoire en 2 volumes, Morvan est-il décidément limité par le format? Vraiment j’en aurais voulu plus. Beaucoup plus. Eric_M (catégorie Lectures) Liens Spirou point com : le site n°47 et n°48 : mes commentaires sur les 2 précédents albums
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11 juillet 2006 : Isaac Asimov nous donnait des nouvelles des robots
Auteur américain né en Russie, Asimov est l’un des auteurs de science-fiction le plus important du XXe siècle. Et le plus prolifique. Déjà évoqué ici et là dans ce blog, Isaac Asimov méritait largement un article pour lui seul. Voici le premier d’une série qui s’annonce longue. On commence avec ce qui a fondé sa renommée : ses nouvelles sur les robots. Lors de la Seconde Guerre Mondiale, Asimov inventait le terme de « robotique ». Alors que l’industrie actuelle n’emploie les robots que sous forme d’outils articulés, Asimov avait fait le pari d’un développement vers des robots humanoïdes destinés à utiliser des machines auparavant manipulées par les humains. De telles créations étant complexes, il les a dotées de cerveaux « positroniques » (alors que les circuits « électroniques » ont triomphés) régis par ce qu’il a appelé « les Trois Lois de la Robotique ». Sommairement, il s’agissait de mettre fin au « complexe de Frankenstein » en garantissant qu’aucun de ces robots ne se retournerait contre son créateur. L’interaction entre ces trois lois a donné lieu à des développements tellement riches que les nouvelles qui l’explorent couvrent plusieurs recueils. Voyons-en les principaux. Les robots/I Robot (1950) Le recueil I, robot a récupéré son titre original après le film joué par Will Smith. Il contient les plus anciennes nouvelles de robots d’Asimov. Il met en scène le Dr Susan Calvin, robopsychologue chez US Robots, qui donne une continuité à tous ces récits dont beaucoup se passent dans l’Espace. On s’attache à elle au cours du livre, on s’émerveille de la construction logique de ces histoires mais l’action n’y est pas haletante et l’ensemble garde un petit côté démodé de la science-fiction de l’époque. Mais quel plaisir d’entrer dans la période de gestation d’une oeuvre aussi immense! Un défilé de robots (1964) C’est le seul autre recueil de nouvelles à être exclusivement consacré aux robots. Mais malgré la label « Cycle des robots » apposé sur la nouvelle édition, le livre est constitué d’histoires hétéroclites, sans rapport entre elles et situées à des périodes diverses. Lenny est l’une de mes nouvelles préférées : elle donne à Susan Calvin un rôle attendrissant qu’elle n’avait jamais eu ; quant à l’image de couverture, elle renvoie à Satisfaction garantie où Asimov prouve que l’amour est aussi un des ingrédients de ses histoires. Tout comme l’humour! Mais l’ensemble n’est pas indispensable. L’homme bicentenaire (1976) Ce recueil sympathique contient plusieurs histoires de robots mais pas exclusivement. Dans L’intuition féminine, on crée un robot sensé penser comme une femme tandis que la nouvelle-titre, qui n’est pas ma préférée, a été adaptée au cinéma par Chris Colombus avec Robin Williams dans un film que je n’ai pas vu. Trombes d’eau quant à elle aurait fait un excellent suspense bien qu’Asimov l’ait écrite précisément pour être rejetée par Hollywood! On y retrouve aussi des histoires autour de Multivac, ou plus généralement de Machines – on dirait ordinateurs – dont Asimov imaginait que le pouvoir d’analyse risquait de remplacer la réflexion humaine. Le robot qui rêvait (1986) Malgré son titre, ce recueil ne contient que 2 histoires de robots. Mais c’est l’un des plus intéressants, mon préféré en tout cas. La nouvelle-titre a certainement été un point de départ pour le film I, robot mais Susan Calvin, qui revient pour l’occasion, traite l’affaire d’une manière radicale, sans rapport avec le film. Citons aussi Sally et son petit côté Christine, Le petit garçon très laid qui rappelle beaucoup Lenny ou le très intelligent Mon nom s’écrit avec un S. Enfin, Les yeux ne servent pas qu’à voir est un pur moment de poésie. Comme dans d’autres histoires, Asimov imagine la forme ultime de l’homme comme champ de force, ou vortex d’énergie, ce qui lui permet par ailleurs d’explorer son rapport avec la religion. Citons pour terminer d’autres recueils dans lesquelles les histoires de robots sont très peu nombreuses : Espace Vital (1957) parle de robots dans Effet Miroir qui met en scène les héros des Cavernes d’Acier, premier roman d’Asimov sur les robots, objet d’une prochaine chronique. On y retrouve Devoir civique (intitulé Le votant dans Le robot qui rêvait) et Satisfaction garantie (Un défilé de robots). Trois livres sont tirés du recueil américain Nightfall : Quand les ténèbres viendront, que je n’ai pas lu, L’amour, vous connaissez ? (1969) où l’on retrouve Sally et Jusqu’à la quatrième génération (1969), très bon (notamment la nouvelle titre) mais redondant avec Le robot qui rêvait (on retrouve Les yeux ne servent pas qu’à voir, Le briseur de grève et La machine qui gagna la guerre). Avec tout ça, vous avez de quoi découvrir le maître Asimov! Eric_M (catégorie Lectures) Liens Isaac Asimov, un site perso en français étonnamment complet Archives des Newsletter : ma réaction à chaud sur le film I, robot avant que je lise les nouvelles d’Asimov I, robot et L’homme bicentenaire : la fiche des films sur AlloCiné
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16 avril 2006 : Nathalie Kuperman a renvoyé qui ?
Elle a renvoyé Marta, sa femme de ménage. Pas Marta sa grand-mère ni Marta sa fille bien entendu. Quoi que. L’une des grandes trouvailles du dernier roman de Nathalie Kuperman (J’ai renvoyé Marta chez Gallimard) est cette homonymie entre 3 personnages essentiels pour la narratrice : cette grand-mère qu’elle a tant aimée, sa fille encore toute petite qui nous renvoie à son rapport à sa propre mère et sa femme de ménage. Grâce à cette dernière, c’est le rapport à l’hygiène de la narratrice qui apparaît d’abord, notamment à travers sa gestion des éponges. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai acheté le livre : je déteste utiliser des éponges mal rincées et je suis assez maniaque là-dessus chez moi. Or, pour la première fois, j’entendais parler d’un personnage qui leur assigne des couleurs suivant leur emploi et qui déclare qu’une éponge est « nécessaire dans une maison, facile d’emploi » mais que « les éponges absorbent autant que possible, ce sont des nids à microbe » et qu’il faut les « entretenir dans un état de propreté exceptionnelle » 🙂 Derrière cette obsession, se cache d’autres troubles magnifiquement décrits par Nathalie Kuperman, même si « décrit » n’est pas le mot : Kuperman nous place dans le cerveau de la narratrice, décryptant notamment d’une façon jouissive les non-dits et les codes de langage comme se soupir lancé à la sortie d’une crèche devant un comptoir : « c’est un sourire codé auquel je réponds ; je dois soupirer moi aussi pour participer à la fatigue commune qui accable les mères. » Par ailleurs, la progression est très maîtrisée entre le début très enlevé et un côté dérangeant qui monte, la trouvaille d’homonymie nous plaçant de temps à autres dans le même état de confusion que la narratrice, sensation très particulière. Le roman étant court et se lisant vite, je conseille d’ailleurs de le lire en une seule fois car, ayant dû interrompre ma lecture vers le milieu, je suis rentré moins facilement dans la dernière partie. Mais en tout cas, j’ai passé, contrairement à la narratrice, un vrai bon moment. Liens Nathalie Kuperman chez Gallimard Le Prix du Livre Inter 2006 sera attribué le 15 mai : retrouvez tous les livres en compétition dont J’ai renvoyé Marta ainsi qu’une interview de Nathalie Kuperman (à écouter après avoir lu le livre pour ne pas en savoir trop!)
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02 novembre 2005 : La Machine à Explorer le Temps à travers 3 époques
Le roman de H.G. Wells évoqué dans ma précédente chronique a donné lieu à 2 adaptations cinématographiques. Regardons comment un même thème a évolué. La Machine à Explorer le Temps est le premier récit de voyage dans le temps. En 1960, le roman a été adapté une première fois par Hollywood puis une seconde fois en 2002 par Simon Wells, arrière petit-fils de l’écrivain. Cette dernière version a été diffusée sur France 3 il y a quelques semaines. L’adaptation de 1960 reste assez fidèle au roman de Wells sauf sur quelques points. Tout d’abord, l’Explorateur – nommé George pour l’occasion – parcourt le XXe siècle et ses 2 guerres jusqu’en 1966 où une guerre nucléaire détruit la civilisation. Ensuite, les intentions du héros sont très différentes dans les 2 oeuvres. Le héros de Wells découvre le futur par curiosité scientifique et, une fois sur place, n’a de cesse que de trouver sa machine pour en partir. Le héros du film de Pal, quant à lui, cherche à débarrasser le monde futur de la domination des Morlocks et finit par y revenir définitivement pour l’amour d’une jeune fille. Cette Weena a dans le roman une place toute différente. Il se tisse entre elle et l’Explorateur une « étrange amitié » mais pas de l’amour : « C’était une délicate créature, haute d’environ un mètre vingt (…) Elle était absolument comme une enfant (…) Je n’étais pas venu dans le futur, me disais-je, pour mener à bien un flirt en miniature ». Enfin, Wells exprime dans son roman ses idées « socialistes » : la séparation du monde en deux peuples, les Eloïs et les Morlocks, est pour lui le résultat extrême de l’exploitation de la classe laborieuse par la classe possédante, jusqu’au déclin. Pour le cinéma de 1960, tout s’expliquait par les différentes formes de survie des humains après la catastrophe nucléaire. Une préoccupation qui témoigne bien de l’époque. Le film de 2002 rajoute ses propres développements à l’histoire et s’inspire plus du film de 1960 que du livre (Philby le meilleur ami, la mode qui défile sur le mannequin d’une vitrine, un arrêt pendant la catastrophe qui détruit la civilisation …). Dans le film de Simon Wells, le héros se nomme Alexander Hartdegen et vit à New York (!) Il construit sa Machine afin de remonter dans le passé pour sauver sa fiancée de la mort. Sans succès. Afin de comprendre pourquoi il ne peut changer le passé, il se lance dans le futur et se retrouve chez les Eloïs. Ceux-ci ne sont plus les hippies blonds des années 60 mais de superbes métis vivant à flanc de falaise. Le héros tombe amoureux et décide de les sauver. Pour cela il se confronte à l’Uber-Morlock incarné par Jeremy Irons et détruit sa machine avant de s’installer définitivement avec eux. Dans cette version, la chute de l’humanité est due à un progrès forcené qui, détruisant la Lune, finit par ravager la Terre. Encore un point de vue ancré dans l’époque. Cependant, certains éléments du ce monde (divisions en castes au rôle précis et contrôle par télépathie) font penser au futur imaginé par Barjavel dans Le Voyageur Imprudent (voir la précédente chronique). Si la première partie du film de 2002 est plutôt bien imaginée, le film m’a déçu pour une raison précise. Il semble conçu comme un film d’action mais la scène d’attaque par les Morlocks m’a peu convaincu notamment car elle se déroule … de jour! Toute l’atmosphère du roman faite de clair-obscur, d’angoisse du noir et de mystère s’évapore. De plus, au lieu de prôner la résistance collective, le film a l’air d’exalter l’héroïsme individuel, le tout prenant un ton grandiloquent. Le film de 1960 a un certain charme (disons désuet) mais les hommes costumés en Morlocks sont si peu crédibles qu’il est impossible d’avoir peur. Seul le roman de Wells a gardé, 110 après, tout son pouvoir de fascination. Eric_M (catégories Lectures & Films-Séries ) Liens Ma précédente chronique sur les romans de Wells et Barjavel La Machine à explorer le Temps de George Pal sur AlloCiné Time Machine (2002), le site officiel Gary Westfahl fait une chronique complète de cette adaptation … en anglais Isaac Asimov, Harlan Ellison (auteur, scénariste de Star Trek) et Andrew Lloyd Webber (compositeur de comédies musicales) sont cités dans Time Machine à propos du voyage dans le temps, chaque version mettant en scène un musée désaffecté.
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01 novembre 2005 : Voyager dans le temps avec Wells et Barjavel Suite des mes lectures de science-fiction avec La Machine à explorer le Temps de H.G. Wells et Le voyageur imprudent de Barjavel. Après Ravage, René Barjavel a publié son deuxième roman, Le voyageur imprudent, en 1944. Démarrant au temps des privations de l’Occupation, le roman va explorer différentes époques. Vous l’aurez compris, on parle de voyage dans le temps. J’évoquais Ravage il y a peu. Le Voyageur en est la continuation sinon la suite. Le héros, quittant les années 1940, fera une pause en 2052 pendant la catastrophe décrite dans Ravage puis se retrouvera en l’an 100 000 pour découvrir comment le monde a évolué avant de se déplacer dans le passé. Le Voyageur Imprudent tient en haleine en permanence grâce à un vrai suspense et une histoire extrêmement riche. Les considérations sur l’histoire du monde se doublent d’une très belle histoire d’amour sublimée dans des passages d’une grande sensibilité. De plus, le roman explore à fond ce qu’on a appelé depuis les paradoxes temporels culminant à la fin du roman. Le post-scriptum ajouté pour l’édition de 1958 lui donne encore, s’il était nécessaire, une dimension supplémentaire, le faisant accéder au rang de livre incontournable. La Machine à Explorer le Temps, quant à elle, est la première histoire de voyage dans le temps jamais écrite. Publiée par H.G. Wells en 1895, elle pose son intrigue dans les salons Victoriens de la fin du XIXe siècle. « L’explorateur du temps » expose à ses amis une formidable découverte : il fait disparaître devant eux une petite machine en la transportant dans le futur. Face à leur incrédulité, il tente le voyage lui-même sur une machine grand modèle. Curieux de ce qui attend l’humanité dans le futur, il fait défiler les années puis les siècles et s’arrête en l’an 802 701. Dans une nature luxuriante, il découvre un peuple étrangement passif, les Eloïs, confrontés aux Morlocks qui, chaque nuit, surgissent des profondeurs. La Machine de l’Explorateur disparaissant mystérieusement, il tente le tout pour le tout pour la récupérer. Comme La Guerre des Mondes, j’avais lu ce livre étant ado et je l’ai relu d’une traite. Les Morlocks m’avaient laissé une forte impression et le passage où l’Explorateur se retrouve dans le noir sans allumette face à eux était resté gravé dans ma mémoire. Passionnant à lire, La Machine de Wells n’a cependant pas l’étendue du Voyageur de Barjavel. Dans la préface de ce dernier, Pierre Desgraupes écrit que « Wells avait à peine effleuré dans une longue nouvelle les possibilités d’un pareil postulat » alors que Barjavel « en illuminait toutes les faces », inaugurant ainsi une longue lignée de récits de science-fiction. Le roman de Wells a cependant l’antériorité. J’y reviendrai plus en détail dans ma prochaine chronique en évoquant les deux adaptations qui en ont été tirées pour le cinéma. Liens Ravage : ma chronique du 03 septembre Le BarjaWeb, site perso sur Barjavel La Guerre des Mondes : ma chronique du 17 juillet H.G. Wells sur sfstory.free.fr H.G. Wells sur Le Cafard Cosmique La fin de l’éternité d’Isaac Asimov est pour moi le roman qui conclurait une trilogie des classiques du voyage dans le temps. J’y reviendrai plus tard.
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08 octobre 2005 : Voilà le nouveau tome de … Spirou Contrairement à ce qu’on aurait pu s’attendre, je ne m’apprête pas à parler du nouvel Astérix mais bel et bien du nouveau Spirou par Morvan et Munuera. Presque sorti dans l’anonymat, le deuxième tome des nouvelles aventures de Spirou et Fantasio vient de paraître sous le titre L’homme qui ne voulait pas mourir. Continuant, après Paris-Sous-Seine (voir ici) à jouer avec les classiques de la série, le nouveau tandem s’attaque cette fois-ci à Spirou et les héritiers. Ayant acheté l’album pour l’occasion, je viens donc de découvrir le tome 4 de la série signé Franquin. Un épisode plus qu’important pour plusieurs raisons : l’invention du Fantocoptère (l’expo Franquin à la Vilette m’a appris que l’idée avait été testée par l’armée américaine puis abandonnée), le rôle important donné à Zantafio et surtout la première apparition du Marsupilami qui utilise déjà très bien sa longue queue. C’est très touchant de voir comment le Marsupilami s’attache à Spirou et Fantasio en découvrant le rire 🙂 Du coup, le petit animal devient facétieux et se laisse piéger par eux. Le tome 48 reprend astucieusement les personnages du n°4 et s’inscrit dans la totalité de la saga grâce à un clin d’oeil assez drôle à La naissance de Spirou par Rob-Vel en 1938 (à voir dans le Hors-Série n°3) ou à la dernière apparition de Zantafio dans Spirou à Moscou par Tome & Janry. Comme le n°47, le dernier Spirou donne une large part à l’action, grâce à un découpage vif mais fluide et des planches visuellement soignées. Les jeux de mots sont toujours là comme preuve du second degré puis la fin traite longuement du conflit entre les paysans d’Amérique et les indiens natifs des terres où ils s’installent. Etrangement, le problème est vivement résumé par Spirou en deux cases : « les vrais coupables (…) ce sont les colonels qui dirigent le pays (…) Plus vous vous entretuez, plus le dictature se renforce ». Mais le vrai vainqueur sera finalement l’amour grâce au sacrifice de l’un des personnages. Premières impressions plutôt positives après la première lecture. L’histoire semble mieux construite que la précédente, les dessins sont toujours aussi réussis (mais il n’y a plus l’effet de surprise). J’apprécie aussi que Spip, devenu vif et combatif, ait retrouvé la parole que Tome & Janry avaient fini par lui enlever. Difficile de critiquer le côté gentiment moralisateur car aucune des parties n’est épargnée. On est beaucoup plus surpris du revirement soudain (et qui sonne faux) de Zantafio à la fin des Héritiers. J’attends juste la suite, le temps que Morvan & Munuera, enfin détachés des grands mythes de la série, construisent enfin leur oeuvre personnelle. Ils en ont les moyens. Liens La bande-annonce du n°48 sur Sirou.com. On y découvre la pochette ci-dessus où apparaît Zantafio, contrairement à la pochette Ma chronique du n°47, Paris-Sous-Seine |
03 septembre 2005 : Ravage en Amérique Alors que La Nouvelle-Orléans manque de sombrer dans le chaos, les mots de Barjavel me reviennent. Rappelez-vous, tout a commencé ici, la Guerre des Mondes de Spielberg me redonnait le goût de lire de la SF (Science-Fiction). Sur les conseils de mon copain, je commençai par Ravage de René Barjavel, le pionnier de la SF en France : en 2052, l’arrêt inopiné des appareils électriques met fin à la civilisation technologique. Ce qui frappe tout d’abord, c’est la qualité de l’écriture de Barjavel. Outre l’imagination fertile et la force du récit, on est impressionné par la puissance évocatrice d’un style capable de passer du lyrisme poétique à des descriptions presque insoutenables. D’autre part, le livre est loin d’être manichéen et Barjavel ne tire pas une morale claire de son histoire. Et si, dans ces pages, il reste de l’époque (1943) un certain machisme (en tout cas une idée du rôle de la femme), elles se trouvent en revanche débarrassées du poids de la religion, d’une manière étonnamment moderne. Au final, un livre ambigu … et passionnant. Dimanche dernier, le cyclone Katrina dévastait le sud des Etats-Unis et, en quelques jours, un état de chaos incroyable (morts, sans-abri, pillages, viols …) s’est installé. J’ai alors repensé à Ravage. J’avais été étonné de la vitesse à laquelle les personnages du roman sombrent dans la panique et la société dans le chaos. Or, en Louisiane, quelque chose de semblable s’est passé. Barjavel : « L’Amérique, tout à l’heure si proche, venait de reprendre sa place ancienne, au bout du monde. (…) Chacun allait se retrouver dans un univers à la mesure de ses sens naturels, de la longueur de ses membres, de la force de ses muscles. » « Les vitrines et les portes des cafés enfoncées, les hommes sautèrent par-dessus les tables, sur les comptoirs, se ruèrent sur les bouteilles multicolores, ils se les disputaient comme des loups se disputent un agneau (…) La loi de la jungle allait devenir la loi de la Cité. » « Dans les rues, où les détritus s’amoncelaient, circulaient des gens aux joues creuses qui s’entre-regardaient comme des loups. Des vieillards, des enfants, des femmes, incapables de se procurer par la force de quoi manger, fouillaient les ordures, les épandaient sur le chaussée, y trouvaient d’immondes nourritures qu’ils dévoraient sur place. Parfois un d’eux chancelait, portait la main à la tête, s’abattait d’une pièce, et se roulait sur le sol en claquant des dents, jusqu’à ce que l’immobilité de la mort le saisît. » La réalité rattrape toujours la fiction. Liens Le BarjaWeb, vie et oeuvre de Barjavel
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15 juillet 2005 : La Guerre des Mondes : l’image et les mots
Ayant vu lundi le dernier Spielberg, j’ai eu envie de relire le roman de H.G. Wells que j’avais lu quand j’étais petit. Impressions comparées. Prenons les choses dans l’ordre et commençons par mes impressions « à chaud » sur le film. Tout d’abord, c’est un film très spectaculaire, assez sanglant et, pour moi, finalement très noir. En effet, le film montre bien l’impuissance des hommes face à des envahisseurs qui les dépassent. En bon américain, un des héros du film s’étonne d’ailleurs à un moment : « La plus grande puissance du monde anéantie en quelques heures! ». C’est pour moi le point central du film, la résonance avec la situation géopolitique est criante. Ici, le « héros » joué par Tom Cruise fait ce qu’il peut dans une situation extraordinaire. N’attendez pas d’acte héroïque final à la Independance Day : dans la chaos général, c’est toute la petitesse des bassesses humaines qui ressort comme en témoigne cette scène marquante où les héros se font prendre leur voiture. En cela, le film me semblait conforme à l’idée que j’avais gardée du roman de Wells. Je n’avais que de vagues souvenirs de l’adaptation américaine des années 50, sinon des trucages assez sommaires qui la rendaient peu excitante. Du livre, il me restait plutôt une sensation. Dans le roman, en effet, les envahisseurs arrivaient à bord de cylindres qui s’enfonçaient dans le sol (dans le film, leurs machines sont assez bizarrement placées dans le sol depuis … on ne saura jamais combien de temps). Je me rappelle très bien qu’enfant j’imaginais ce que je ferais si un de ces cylindres tombait dans la pelouse qui se trouvait derrière mon immeuble et si je devais me réfugier dans les caves. Tombant par hasard sur le livre judicieusement placé en évidence sur les rayons de la FNAC, je ne résistai donc pas à l’acheter. Première évidence : le roman situant l’action en 1898, le film de Spielberg en est donc une transcription à l’époque actuelle. Mais surtout, les personnages principaux ne sont pas ceux du livre qui est raconté par un romancier marié et sans enfants. Néanmoins, on retrouve assez fidèlement les tripodes, leur « Rayon Ardent » et leur façon de se nourrir même si la représentation par Spielberg des extraterrestres me semble plus proche de celle d’Alien que de Wells. La scène la plus ressemblante au livre est celle de l’enfermement dans une maison proche des aliens (le personnage joué par Tim Robbins semblant inspiré à la fois du vicaire et de l’artilleur). Enfin, si la scène de la voiture ne s’y trouve pas telle qu’elle, elle retrace bien l’ambiance que décrit Wells quand son frère se trouve en possession d’une voiture à cheval au milieu de la foule. Mais ce qui m’a frappé le plus, c’est l’excitation avec laquelle j’ai lu ce livre. Alors que j’étais un gros lecteur dans ma jeunesse (notamment de science-fiction), j’ai peu à peu perdu le temps de lire des romans. Au risque de dire une banalité, j’ai redécouvert à quel point le roman (comparé au cinéma) ouvrait l’imaginaire : sans images et particulièrement s’il est écrit à la première personne, un livre permet une identification immédiate avec les personnages. En quelques secondes, on est dans l’histoire. C’est cette vieille sensation que j’ai retrouvée … enfin! Du coup, je vais me jeter rapidement sur les autres Wells : La machine à explorer le temps, d’abord, dont j’ai gardé un souvenir très fort et qui reste un de mes livres préférés mais aussi L’île du docteur Moreau et L’homme invisible dont j’ignorais qu’ils étaient de lui aussi. Lecture, me revoici 🙂 Eric_M (catégories Lectures & Films-Séries) Liens Le site officiel du film de Spielberg Un site sur le film de 1953 par Byron Askin Un article de Commeaucinema … sur la nouvelle édition du roman de Wells chez Folio, celle que j’ai achetée, préfacée par Norman Spinrad : « La guerre des mondes s’est hissée depuis longtemps au rang de ces oeuvres exceptionnellement rares (…) qui ont transcendé leur origine littéraire pour devenir des mythes fondateurs (…) Mais il y a un siècle, H.G. Wells a tiré cette histoire de sa propre imagination »
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11 mai 2005 : Têtu depuis 10 ans
Têtu, le magazine des gays et des lesbiennes, fête ses dix ans avec un numéro spécial. J’ai acheté mon premier Têtu en novembre 1997 avec le très mignon DJ Wild en couverture. Un mois plus tard, j’avais 24 ans et la photo de Une était celle d’un certain … Eric. Acheter Têtu à cette époque était pour moi une façon de m’affirmer. Côté magazines gay, je n’avais jusqu’ici testé que les revues porno. Têtu est un magazine généraliste (culture, actualité, mode, prévention …) et pourtant dans toutes les librairies où je suis allé, il était toujours rangé tout en haut à côté des photos d’hommes nus. Pour éviter le « Bonjour Madame, je voudrais acheter Têtu s’il vous plaît », il fallait se livrer à toutes sortes de contorsion pour l’atteindre. Par contre, le moment du passage en caisse était toujours un grand plaisir. J’ai fini par m’abonner. Déjà, ça revenait moins cher. Et puis plus besoin de se déplacer pour le chercher et pas de risque de le rater. Selon les périodes, telle ou telle rubrique, telle ou telle interview m’ont plus particulièrement intéressé puis, par lassitude ou manque de temps, j’ai fini par le lire de moins en moins. Et voilà que je reçois dans ma boîte aux lettres un numéro deux fois plus gros que d’habitude. J’ai d’abord pensé qu’ils m’envoyaient par erreur deux numéros au lieu d’un. Mais non : je tenais dans mes mains Le numéro 100, Le Numéro Collector ! (roulement de tambour …) Ce numéro collector c’est un peu le Têtu dont on rêve. D’abord, il y a les interviews de personnalités de tous horizons (Muriel Robin, Catherine Lara, Etienne Daho, Roselyne Bachelot, Whoopi Golberg et beaucoup d’autres) sur lesquelles on se jette évidemment. Mais il faut prendre le temps de savourer l’article sur l’évolution du regard des français sur l’homosexualité et le cahier spécial 1995-2005 (les « (ré)volutions » en télé, sexe, prévention, marketing) et surtout les 10 ans d’actu avec de vrais morceaux de Têtu dedans. Nostalgie, quand tu nous tiens … Voilà donc le bon moment pour découvrir Têtu. Par contre, je ne suis pas sûr qu’il en reste encore en kiosque 😉 Liens Têtu.com est le parfait complément du mensuel grâce notamment à ses liens ou son actualité au quotidien. Je me suis d’ailleurs abonné à la newsletter (dite « le quotidien ») et je ne regrette pas de cette source régulière d’infos qu’on n’entend pas partout. |
05 novembre 2004 : L’Odyssée d’AstérixDans une minute, vous n’aurez plus d’excuses pour ne pas courir acheter le Hors-Série Lire
Le magazine Lire vient de publier son premier Hors-Série qui est consacré à Astérix. Trop en faire en l’intitulant « L’histoire secrète d’Astérix » avec des rubriques comme « Uderzo : Ma vérité » ou « Goscinny intime » pouvait faire craindre le pire. Mais pas du tout, c’est un petit bijou ! Je connaissais Astérix, évidemment, mais bien moins que Tintin qui reste ma référence absolue. J’ai quand même lu tous les albums, certains plusieurs fois. Par-dessus tout, j’ai adoré « Le combat des chefs » et les premières pages du « Bouclier arverne » restent pour moi un pur chef d’œuvre : la crise de foie du chef avec tout le village qui vient lui appuyer sur le ventre puis son départ en cure où il s’empiffre en citant des proverbes du genre « Quand l’appétit va, tout va » jusqu’à ce qu’une feuille lui tombe sur le ventre. Un régal ! Mais avec ce Hors-Série, j’ai découvert l’envers du décor. Pour Tintin, j’avais lu avec passion « Tintin et l’Alph’Art » (dans l’ancienne édition, pas celle en album) où on voyait un Hergé qui découvrait les dialogues et le découpage en dessinant, par tâtonnement, l’histoire elle-même semblant s’écrire sous ses traits de crayon. Pour Astérix, rien de tout cela : Goscinny tapait à la machine un synopsis de l’histoire puis un découpage page par page et case par case !! Pour chaque case, Goscinny décrivait très précisément à Uderzo ce qu’il devait dessiner et lui donnait le dialogue complet, jusqu’aux bruitages d’une bagarre « Paff Boumm Ouille Aille » ! Les exemples fournis sont édifiants et passionnants. Ce document et les autres (cf. le CV farfelu) montrent combien le génie comique d’Uderzo transparaissait dans sa vie et pourquoi il lui survit. J’ai aussi beaucoup aimé les commentaires que livre Uderzo sur chacun des albums : certaines anecdotes valent vraiment la peine. L’ entretien qui suit est un bon complément. J’avais parfois trouvé que, depuis qu’il réalise seul les nouveaux albums, Uderzo avait un peu trop tendance à tirer la couverture à lui. Or, tout ce Hors-Série prouve l’admiration sans bornes qu’il a toujours eue pour Goscinny et lui-même parle d’orgueil à avoir voulu continuer malgré tout. Petite curiosité supplémentaire, des traductions et commentaires sur les expressions latines dans Astérix, particulièrement celles des pirates ; bon, ça n’intéressera peut-être pas tout le monde. Je conseille par contre fortement l’hommage de Gotlib à Astérix : irrésistible ! Emouvant aussi de découvrir celui que Franquin a dessiné en 1991. Voilà ce que j’en retiens pour l’instant (je n’ai pas tout lu encore). Pour les déjà-spécialistes ou ceux qui veulent aller plus loin que ces témoignages, le numéro se termine par une bibliographie qui devrait les combler. Bref, pour ce Hors-Série, vous pouvez dépenser 6,50 € dont 1 € reversé à l’association « Lire et faire lire » … parce qu’il le vaut bien ! Liens Le sommaire du Hors-Série sur le site Lire.fr Le village virtuel d’Astérix et Obélix : le site officiel Le site interactif, le site de Stéphane Rivière : site personnel
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21 septembre 2004 : Spirou et Fantasio n°47 – Paris-Sous-Seine
Le nouvel album est sorti : j’ai vu, j’ai lu, j’ai relu. Déjà 6 ans que Tome et Janry n’ont pas sorti de « grand » Spirou (voir la newsletter du 16 août) et c’est un nouveau tandem qui s’y colle : Morvan au scénario et Munuera au dessin. Alors, bien sûr, chacun y va de son avis. Pourquoi se priver ? Audacieux, j’ouvre à la première page : « l’eau a coulé sous les ponts … » – merci pour le clin d’oeil – mais pas tant que ça. Fini le Spirou post-moderne de Machine Qui Rêve, l’album qui signa la fin de Tome et Janry, on a l’impression d’un retour en arrière. Spirou ressemble même à un gamin sur cette planche. Puis je me jette à l’eau et je lis le reste d’un coup. Et je m’arrête surpris. Plusieurs enchaînements m’ont paru difficiles à suivre (j’ai vérifié que je n’avais pas sauté de page). Spirou et Fantasio eux-mêmes semblent emportés par une vague contre laquelle ils ne peuvent rien. Sans eux, finalement, tout aurait coulé de la même façon. Alors, je me mets à relire toute l’histoire, je prends le temps d’admirer les décors et je découvre plein de détails dans certaines cases. Le design de Buchet apporte un modernisme supplémentaire à la série sans la dévier de sa tradition : pour moi, visuellement, c’est réussi. Mais cet album restera pour moi un album de transition. Les auteurs prennent leurs marques et surtout annoncent une suite qui paraît prometteuse. Leurs références explicites aux précédentes aventures des héros créent une continuité entre les périodes de Franquin puis Tome et Janry qui dans mon esprit étaient restées étanches jusqu’ici. Les seconds ne s’étaient pas privés de reprendre les personnages du premier mais, par exemple, leur Retour du Z était plus un pied de nez qu’une suite comme les fans pouvaient l’attendre. Or, Morvan revient de manière intelligente aux sources de Zorglub*. Du coup, j’ai eu envie de plonger dans les albums que je ne n’avais pas lus en attendant le suivant. Laissons à Morvan et Munuera le temps d’installer leur univers. Au moins jusqu’au numéro 48. * Lors de l’apparition de Zorglub (Z comme Zorglub, planches 8 et 9), on apprend que lui et le comte de Champignac ont été étudiants ensemble. J’ai relu ce passage pour m’en convaincre, j’ai toujours été persuadé que Champignac avait été le professeur de Zorglub vu l’apparente différence d’âge. Et Panade à Champignac n’a fait qu’accentuer cette confusion de générations … Liens le mini site de l’album : incontournable. Interviews, bonus … le forum de BD Guest’ : très complet, prenez votre temps (utilisez la barre de navigation en bas). On y trouve la couverture originale de l’album (ci-contre) L’album donne envie de (re)visiter Paris. Ajout du 04 novembre : désormais, c’est fait : voir les photos Qui se souvient de Love Bizarre ? Je n’ai pu empêcher de penser à leur chanson Paris Sur Mer sur l’album du même nom (1994) : lire les paroles
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